LES MÉDIAS ET LA PROBLÉMATIQUE DE L’IMAGE DEPUIS LES PROCÉDÉS DE REPRODUCTION

Tous droits d’auteure © 1997 Lynn Millette

RÉSUMÉ

INTRODUCTION

CHAPITRE I: SUR NATUREL

CHAPITRE II : DE LA MAGIE À LA SCIENCE

CHAPITRE III : LES TRANSFORMATIONS IMAGIÈRES

CONCLUSION

NOTES ET RÉFÉRENCES

sur naturel 02

Sur/Naturel, 1997, détail,
Huile sur papier Arches, 0,09 X 0,09 mètres

Chapitre 2: De la magie à la science

Il semble exister une tendance profondément enracinée dans la pensée humaine qui consiste à chercher ce qui persiste à travers le changement. L’épanouissement naturel des choses peut continuer ou peut être contrecarré par des forces extérieures. Pendant que la nature existe en harmonie avec elle-même, nous nous retrouvons absorbés dans un questionnement perpétuel face à elle. Nous observons un nombre infini d’objets apparemment sans liens. Toutefois, ce chaos apparent cache une permanence, une pérennité, une unité perceptible (Guthrie, 1975).

Depuis le début de la civilisation, l’accumulation de connaissances nous éloigne davantage du rythme naturel de la vie. Parce que la nature est notre modèle, nous voulons la maîtriser pour en extraire ce qui est nécessaire à notre survie. Or nos besoins rudimentaires ont dérangé le système naturel. Il est curieux de constater que le système dont nous sommes issus, nous rejette. Pourquoi? Nous tentons de comprendre davantage ce qui est, après tout, la perfection.

Nous sommes pourtant des êtres naturels nés d’une mère comme un animal. Nous exprimons cette composante animale lorsque nous réagissons instinctivement à la nature.

L’univers est grand et mystérieux et nous le pensons depuis toujours. La religion et les arts répondent à l’inexplicable. De la magie est venue la technologie qui demeure toujours l’application utile de la science, conçue pour la survie. En imitant la nature, nous tentons de prédire les désastres naturels qui nous frappent dans toute leur violence, mais la nature demeure insaisissable et parfois menaçante.

L’être humain et la nature mènent une existence parallèle. L’homme est à l’extérieur du paysage naturel, en contemplation. Animal instinctif, il tente de saisir avec toutes ses capacités physiques et intellectuelles le sens complexe de son environnement.Le sentiment d’impuissance face à des événements naturels suscitait chez certains peuples des croyances ou des superstitions. Ces légendes servaient à donner une identité à ces phénomènes et donnaient aux croyants l’impression de maîtriser l’inconnu.

Les dessins tels que ceux trouvés à Lascaux ou Altamura ont été liés à ce genre de célébration. Or, les experts ont peine à définir le pourquoi des peintures préhistoriques. J’estime qu’elles ont été exécutées avec passion. Ces pièces reflètent l’inspiration créative d’un artiste, et un double questionnement scientifique et esthétique du sujet. C’est une forme de célébration primitive liée au rituel. L’artiste tentait de comprendre par observation le comportement animal, comment ces animaux migrent, meurent ou se reproduisent. Ce travail fait preuve d’observations intelli-gentes de la nature de manière autant poétique que scientifique.

L’art était le vocabulaire visuel. Il était ce que nous sommes devenus en tant que culture. De l’esthétique est née la métaphore. Les arts sont parmi les composantes du domaine métaphysique, Ils sont à la fois un type de célébration passionnée ainsi qu’une forme de document historique.

La magie est la première forme de science appliquée dont les principes reposent sur les lois de la nature. Lorsque le sorcier mettait en marche une séquence d’événements, de causes et d’effets, il ne faisait qu’établir de manière primitive les lois fondamentales des sciences appliquées.

La magie perçue sous la forme de rituels, superstitions et cultes religieux s’est avérée insuffisante pour la civilisation occidentale. Les philosophes présocratiques s’interrogèrent de manière empirique sur l’environnement. Où sommes-nous? Qu’est-ce que le soleil? Pourquoi disparaît-il pour réapparaître de l’autre côté de la terre? Ces questionnements sont des notions scientifiques de causes et effets. La science exige cette méthode de réflexion linéaire. Elle est action-réaction, déduction, empirisme. Dans ses preuves et explications est perçue la maîtrise des phénomènes naturels pour la survie.

La terre est notre modèle. La prévisibilité des jours et des saisons nous a permis d’établir un rythme à notre existence parallèle à celui de la nature. La science fut inventée pour refléter cette structure. La science observe la réalité naturelle. La méthode expérimentale est liée au caractère de la pensée humaine. Ce qui permet à l’homme de connaître, juger et agir conformément à des principes.

On tente de comprendre l’environnement par la technologie. Mais la nature est impalpable, elle renferme de profonds mystères. Pierre et Marie Curie, par leur recherche en énergie nucléaire, confirment que l’atome a une structure intérieure mais Neils Bohr, dans ses recherches atomiques, a conclu que cette structure
renferme toujours l’inexplicable quand il a démontré que l’électron à l’intérieur de l’atome se comporte de façon quantique.

Les scientifiques reconnaissent l’ubiquité insaisissable de la nature dans le phénomène de pi (π). π apparaît dans la forme des astres, dans la pupille d’un oeil et même dans la double spirale de l’ADN. π se cache dans la courbe d’un arc-en-ciel et dans les anneaux que produit la chute d’une goutte de pluie dans l’eau. On le retrouve également dans les ondes spectrales. π est la clé universelle, l’infini permettant à la rationalité des mathématiques de se plier à la probabilité des événements pour se réaliser.

Ces phénomènes indiscernables se retrouvent autant dans les mouvements imprévisibles des électrons à l’intérieur d’un atome, que dans les prédictions météorologiques. L’univers est vaste. Il reflète dans toute sa plénitude une aura énigmatique. La physique quantique exprime les complexités naturelles de l’existence. Il y semble ex-ister des éléments appartenant à des systèmes chaotiques tandis que d’autres se révèlent plutôt structurés. Planck a démontré qu’il demeure impossible de déterminer avec précision la trajectoire des particules. Cependant ces matières parviennent à trouver un équilibre qui est propice à la vie.

La réalité est ce que nous voyons de la fenêtre présentement. La journée se déroule, on voit le ciel, il existe. La métaphore est une façon poétique de dénaturer la réalité. Le tableau que je peins de cette fenêtre suspend la réalité. L’être humain a réalisé la science et la magie. Nous sommes à l’extérieur de la nature, en contemplation face à elle. Grâce à une approche plus rationnelle, certains aspects de la magie sont devenus scientifiques. Mais la religion ou ce qui était au début des rituels basés sur des superstitions et l’esthétique sont devenus des composantes du domaine métaphysique. Par contre, certains aspects de ces disciplines demeurent entremêlés. Nous retrouvons des qualités esthétiques en sciences.

Tout est issu de la réalité, même la métaphore. Les grands chercheurs ont un respect inouï envers la nature et ses aspects impénétrables. Lorsque Niels Bohr dit qu’il est faux de penser que la tâche du physicien est de trouver ce que la nature est, mais plutôt ce que nous pouvons dire d’elle, il exprime les limites de nos connaissances. Dès que nous commençons à discuter du hasard, du chaos ou de l’infini, nous sommes entièrement dominés par le paysage.

Je vois ce phénomène d’incertitude se manifester dans mon travail. Je ne peux tout contrôler et, parfois, je laisse aller les choses. C’est ce qui est fascinant dans la peinture. J’accepte que l’inattendu se produise sur ma toile. Je me sens ainsi physiquement liée aux événements naturels par la réalisation de mon travail.

 

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